20 mai 2017
Extra-muros
Signes, symboles et autres messages de la Nature
Etude ethnologique des masques en général et ceux du Lötschental en particulier, éthique et Franc-Maçonnerie, transhumanisme… Ce sont quelques-uns des thèmes étudiés ou à venir lors des travaux extra-muros de la Loge Ataraxie. En 2017, c’est au mois de mai que nous nous sommes retrouvés dans un hôtel du Val d’Hérens pour réfléchir ensemble aux Signes, symboles et autres messages de la Nature. Il faut dire qu’aussi bien nos Temples que nos rituels y ont souvent recours. Ces rencontres se font en toute décontraction; les membres d’autres Loges sont les bienvenus, parfois les familles et amis.
Voici quelques notes sur les pistes qui ont été suivies lors de cette dernière rencontre:
Les sept planètes traditionnelles: leurs rapports aux jours de la semaine, aux couleurs, aux métaux et à diverses notions.
La Lune, par exemple, est associée au lundi et à l’argent. Elle est féminité, passivité (pas au sens péjoratif), créativité, intuition. Elle est liée au côté gauche du corps et au cerveau droit qui le commande. Son parfait complément est évidemment le Soleil. Et puisqu’il est question de sept planètes, c’est l’occasion de rappeler quelle est l’importance de ce nombre et pourquoi: sept couleurs de l’arc-en-ciel (selon Isaac Newton, un des premiers membres de la Franc-Maçonnerie spéculative), sept étoiles de la Petite Ourse, dont la Polaire (d’où septentrion), sept collines de Rome; omniprésence du nombre dans la Bible, à commencer par les 6+1 jours de la Création, ainsi que dans les contes (qui ne sont jamais complètement innocents, souvent à caractère initiatique): le Petit Poucet, ses six frères et soeurs et ses bottes de sept lieues. Le Petit Prince et la septième et dernière planète qu’il visite: la Terre. Blanche-Neige et les sept nains…
Petite incursion dans les couleurs, le vert, au hasard: nous le savons, c’est la couleur de l’espoir, celui de la « renaissance » de la nature au printemps. Mais c’est aussi celle de la putréfaction. Mort-renaissance, c’est le principe de l’initiation: il faut mourir à ce que l’on était, se débarrasser de ses « métaux » (passions, ambitions démesurées, égo…), pour devenir. Le lion (ou dragon) vert, dans le langage alchimique (discipline à laquelle s’est frotté Newton), c’est le vitriol, dissolvant nécessaire pour rendre pur un métal (ou un esprit)
grossier, une matière première. C’est le principe du célèbre « solve-coagula »: dissoudre et rassembler, qui semble régir tout dans notre univers, y compris l’univers lui-même.
Mais revenons sur Terre et à la nature. Aux fleurs, pourquoi pas?
A la rose du Petit Prince, puisque nous en parlions à l’instant, symbole de mort et de renaissance spirituelle grâce à l’amour. Symbole du secret caché en son coeur (voir sub rosa); associée à la croix, elle peut représenter la révélation du Secret au point crucial (voir Rose-Croix).
Le tournesol, quant à lui, comme la pomme de pin et bien d’autres, dissimule deux nombres consécutifs de la suite de Fibonacci, dont le quotient approche le nombre d’or, ou proportion dorée, soit l’harmonie absolue.
Les arbres, eux, passent pour être des médiateurs entre « le haut et le bas », les racines étant la réplique terrestre de la ramure céleste. Axe du monde le long duquel l’Homme peut passer d’un degré d’existence à un autre. Ce n’est sans doute pas par hasard que la Tradition en a placé deux au centre du Jardin d’Eden… avec les conséquences que l’on sait. Ni que la Kabbale en a fait le modèle universel de création ou de manifestation avec son arbre séphirotique. Quant à Bouddha, il est né sous un arbre et a reçu l’illumination (renaissance) sous un autre. C’est sans parler en particulier du chêne, symbole de vitalité, de force, de victoire, mais aussi arbre sacré des druides. Ni de notre sapin toujours vert, à l’image de la vie éternelle, que l’on met à l’honneur à Noël, au moment approximatif du solstice d’hiver où l’on fête le retour de la lumière comme – encore – une renaissance.
Puisque nous évoquons Bouddha, selon le Siddhartha d’Hermann Hesse, c’est au bord d’un fleuve, et par lui, que lui a été faite la révélation que tout est UN: fleuve toujours pareil et jamais le même; à la fois permanence (ou être, sujet, Soi… à choix selon les sensibilités) et changement (étant, objet, moi…), mais surtout totalité manifestée à Siddhartha par « ôm ». Pourquoi au bord d’une rivière? Elle est passage, franchissement; il suffit de penser au Styx (ici par Gustave Doré).
Autres plantes emblématiques et souvent associées: le blé et le raisin (illustration: Sagrada Familia, Barcelone). Bien sûr, c’est le pain et le vin, mais aussi le feu et l’eau, donc le Soleil et la Lune, la complémentarité masculin-féminin, comme nous l’avons vu déjà.
Et parmi les animaux, une mention spéciale pour le serpent. On le
croise tous les jours dans la nature, même s’il reste généralement
dissimulé, mais encore sur les enseignes de pharmacies, de médecins, sur les ambulances… Normal: si son venin tue parfois, il permet aussi de confectionner son propre anti-venin. Il faut dire qu’il est l’attribut du dieu grec de la médecine, Asclépios (Esculape pour les Romains), comme de sa fille Hygie, déesse de la santé. C’est lui qui, selon la Genèse, a contribué à rendre l’Homme mortel avant que le Christ montre le chemin d’un nouveau Paradis – construit, celui-ci –, la Jérusalem céleste.
D’un Paradis à l’autre, toute l’aventure humaine. Du Bateleur au Mat si l’on étudie les vingt-deux lames majeures du Tarot. Ou du solve au coagula si l’on préfère la voie alchimique. A ce propos, le père légendaire de l’alchimie est le personnage mythique gréco-égyptien Hermès Trismégiste, apparenté au dieu romain Mercure, ou grec Hermès.
Il est représenté ici avec évidemment son caducée (un
bâton et deux serpents), ainsi qu’un bouc à sa gauche (la senestre, côté obscur, lunaire), et un coq à sa dextre (côté solaire).
Et comment ne pas évoquer encore le Petit Prince? Le serpent est le premier être vivant qu’il rencontre sur Terre, lors de son voyage; ce sera aussi le dernier puisque c’est lui qui lui permettra de regagner sa planète par ce qu’on imagine être une mort initiatique.
Une incursion encore dans la Bible, lorsque le peuple d’Israël doute; alors des serpents apparaissent et mordent, et tuent. Moïse fabrique un serpent d’airain, le hisse sur un bâton; ceux qui le regardent sont sauvés. Vie, mort. Le Coran relate à peu près les mêmes histoires de serpents (voir par exemple la Sourate 20, verset 20).
Conclusion: on pourrait continuer ainsi longuement, mais pour quoi faire? Le lecteur attentif aura remarqué que quel que soit le sujet que nous abordons, l’ « objet » naturel que nous étudions, il finit par nous dire la même chose que les autres. Si nous pouvons plus ou moins cerner cette « chose » avec des mots, des images, des symboles, il vient un moment où aller plus loin s’avère impossible. Si la Vérité ultime était exprimable, il y a longtemps que nous la lirions partout. Le dernier bout du chemin, la découverte de l’indicible, est l’affaire de chacun, en son for intérieur. C’est peut-être bien ça, le secret maçonnique!
Résumé des réflexions échangées, par JMR, Orateur de la Loge